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Le Francophone.
11 février 2008

Les défis de l’administration de la justice dans l’espace francophone

L’institution judiciaire est chargée de mettre en œuvre, en toute indépendance, l’ensemble des règles et principes gouvernant le règlement des conflits devant les cours et tribunaux. Comment assurer l’effectivité et l’efficacité du service public de la justice, de sorte à faire de l’instance judiciaire un acteur de la paix sociale et l’instrument essentiel de la consolidation de l’Etat de droit ?

Au-delà des questions de l’organisation d’une instance judiciaire fonctionnant effectivement et digne de la confiance des justiciables, l’administration de la justice met en jeu des considérations politiques, sociales, historico-culturelles. Elle s’entend ainsi comme l’action d’exercer le pouvoir judiciaire au sein de l’appareil d’Etat. Tout système de justice, accepté et compris par les justiciables, doit être fondé sur des mécanismes conciliant les exigences basées sur des standards internationaux et les réalités propres à son environnement.

La prise en compte de spécificités locales dans l’administration de la justice – comme par exemple l’intégration de modes alternatifs de règlement des conflits, tels les gacacas au Rwanda, l’articulation avec les instances de la justice traditionnelle ou l’édification de procédures basées sur un système juridique hybride – n’est pas en soi incompatible avec l’exercice d’une justice équitable et impartiale. Au contraire, une telle prise en compte peut participer à la pérennité et l’efficacité de l’institution judiciaire.

L’OFFICE DU JUGE MIS A L’EPREUVE

Le principe d’indépendance de la justice est consacré par plusieurs instruments juridiques internationaux (Déclaration universelle des droits de l’Homme du 10 décembre 1948, Pacte international relatif aux droits civils et politiques du 16 décembre 1966, résolutions de l’Assemblée générale des Nations unies des 29 novembre et 13 décembre 1985, portant « Principes fondamentaux relatifs à l’indépendance de la magistrature »).

Dans les pays de l’espace francophone, il est souvent expressément consacré par les sources internes. Ainsi, dans la plupart de ces pays, c’est la constitution elle-même qui définit l’indépendance de la justice (Albanie, Belgique, Bénin, Bulgarie, Cambodge, Egypte, Ile Maurice…). Au contraire, d’autres Etats, comme le Burkina Faso, le Cameroun, la Guinée, la Mauritanie, le Niger ou la République Tchèque n’ont donné aucune acception textuelle à cette notion dans leur droit positif. Et même, certains pays, plus hésitants sur la question, se sont gardés de donner une base constitutionnelle ou législative à l’indépendance de la justice, laissant à la jurisprudence le soin de combler ce vide en consacrant le principe dans le droit national (Suisse, Hongrie, Liban).

De manière générale, le principe d’indépendance signifie que l’institution (l’autorité judiciaire) et la personne (le magistrat et ses missions) doivent être à l’abri d’ingérences internes et extérieures, quelles qu’en soient leur origine et leur nature. Au-delà de l’affirmation solennelle, il appartient au juge lui-même, sous le contrôle de ses pairs (organes disciplinaires, etc.), de donner un sens véritable à son indépendance. A ce titre, il y a lieu d’observer strictement les règles éthiques, c’est-à-dire morales, et déontologiques, c’est-à-dire professionnelles, comme le devoir de réserve, l’intégrité, les obligations liées à la représentation de l’institution judiciaire, etc. En effet, les magistrats sont soumis à une déontologie dont le respect des règles doit relever, au moins pour les magistrats du siège, de la compétence d’une instance indépendante. Il en est ainsi, par exemple, du Conseil supérieur de la magistrature en France, au Sénégal, au Congo (loi du 15 avril 1999) et au Gabon (loi du 14 avril 1993).

Parallèlement à ces garanties, des règles de protection de la personne et de la carrière du magistrat, assorties de procédures permettant d’en assurer l’effectivité, doivent exister. Elles concernent en particulier l’inamovibilité, l’immunité juridictionnelle, les modalités transparentes d’avancement, de mutation, de gestion de carrière et de rémunération.

ACCES A LA JUSTICE : LA QUESTION DU DROIT AU JUGE

L’accès à la justice est une autre composante déterminante de l’Etat de droit. En effet, il n’y a point de droits effectifs si leur proclamation n’est pas suivie de règles permettant à chaque citoyen, en cas de besoin, de saisir le juge et d’obtenir, dans un délai raisonnable, une décision exécutoire. Tout dépend, ici, de la volonté politique des gouvernants de dégager – ou non – les moyens appropriés pour assurer l’efficacité du service public de la justice. Ce qui souligne le fait que la justice a un coût, tant pour l’Etat que pour le justiciable, et révèle en même temps ses difficultés d’application, notamment pour les membres de l’espace francophone les plus dépourvus de ressources.

Bon nombre d’Etats n’ont pas pu se doter d’une carte judiciaire visant à permettre, de façon satisfaisante, l’égal accès de tous les citoyens à la justice. Aussi certains Etats de l’espace francophone (France, Sénégal, Burkina Faso, Rwanda, Gabon, Tchad, etc.) ont-ils mis en place des solutions originales, en appui aux actions des tribunaux ou en dehors de celles-ci, pour répondre aux demandes de justice dans des situations particulières : institution de « juges » traditionnels pour les gacacas au Rwanda, de chefs de quartiers ou de village au Sénégal, ou encore d’autorités coutumières dans les zones rurales au Gabon ; incitation à recourir à des formes spécifiques de règlement des litiges, souvent organisées par l’Etat (par exemple les Maisons de justice et du droit en France, ou divers procédés alternatifs de règlement des conflits).

Enfin, le droit au juge ne se limite pas seulement à la problématique de la répartition géographique des tribunaux ; il met également en jeu les coûts de la justice pour le justiciable, l’accès à une décision judiciaire pleinement exécutoire et le rôle essentiel des auxiliaires de justice pour une bonne administration de la justice. Quel que soit le système envisagé, les coûts de la justice doivent être raisonnables et ne pas dissuader le justiciable d’agir.

L’EMERGENCE DU «JUGE MODERNE » ?

L’efficacité de la justice dépend aussi de la qualité de ses ressources humaines. Cette réalité a justifié la mise en place de mécanismes régissant tant l’entrée (concours, admission sur qualification ou sur titre, etc.) que l’avancement dans le corps (avancement automatique, tableau d’avancement, procédure de la « transparence »…), ainsi que de règles relatives à la formation du personnel judiciaire (programmes spécialisés, formation obligatoire ou facultative, continue ou en alternance…). De manière générale, les Etats de l’espace francophone ont opté pour le recrutement des magistrats par la voie normale du concours, ouvert aux candidats sur critères (âge, nationalité, titre d’accès, casier judiciaire, etc.). Une procédure complémentaire de nomination sur titre est parfois utilisée, par exemple au Burkina Faso, en France, en Bulgarie…

En matière de formation, les efforts déployés par chaque Etat doivent être renforcés, notamment par la mutualisation des moyens et la consolidation de la coopération bilatérale ou multilatérale : échanges de ressources humaines et matérielles, programmes de stages professionnels élargis, ou encore création de centres régionaux de formation pour les pays ayant en commun la langue française…

Les Etats francophones doivent en parallèle prendre davantage en considération les technologies de l’information et de la communication dans la modernisation de leurs systèmes judiciaires. En effet, le recours de plus en plus important à la technologie informatique, et spécialement à Internet, a démontré que le réseau est un formidable outil de recherche et d’information pour le personnel judiciaire, de diffusion des décisions auprès du public et de transparence. Cependant, en dépit de l’utilisation encore marginale de ces instruments, l’on ne peut passer sous silence cette interrogation : les Etats sont-ils prêts à intégrer dans leur pratique judiciaire – sous réserve du respect des exigences de confidentialité et de transparence – l’extension aux voies électroniques des modes de dépôt des écritures, de communication entre les parties, de notification des actes de procédure et de publication de toutes les décisions publiques ? A. Mbaye et P. Chenivesse/MFI

Abdou Diouf, Secrétaire général de la Francophonie, s’est entretenu ce samedi 9 février 2008, dans son bureau parisien, avec Rachida Dati, Garde des Sceaux, ministre de la Justice de la République française.

L’essentiel de leurs échanges a eu pour objet la IVe Conférence des ministres francophones de la Justice, qui se tiendra à Paris les 13 et 14 février, et qui rassemblera les ministres de la Justice des 68 États membres et observateurs de l’Organisation internationale de la Francophonie (OIF).

Organisée conjointement par l’OIF et la France, cette réunion s’attachera à donner un nouvel élan à la coopération entre les États et gouvernements francophones dans le domaine de la justice et du droit. Elle examinera plus particulièrement deux thèmes : - Le développement de la justice pour renforcer les capacités institutionnelles de l’État et prévenir sa fragilisation ; - Le droit et la régulation de l’économie dans l’espace francophone ; Pour rappel, la Conférence sera ouverte le 13 février au Palais des affaires étrangères et européennes par Rachida Dati et Abdou Diouf, en présence de Bernard Kouchner, ministre des Affaires étrangères et européennes. Les travaux se poursuivront le 14 février à l’Hôtel Westin à Paris.

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